Gwenaëlle

http://skriban.wordpress.com/

Tombée dans les livres dès l'enfance, je suis aujourd'hui toujours passionnée par l'écrit. Ecrivain public, j'aide les autres à mettre en forme leurs idées. Blogueuse, je partage mes coups de cœur littéraires. Maman, je lis des histoires à mes enfants... Vous pouvez me retrouver surSKRIBAN

Conseillé par
29 mai 2010

Dans sa maison de New Iberia (Louisiane), Dave Robicheaux mène une vie apaisée, en compagnie de Molly, sa femme, et de ses animaux Snuggs et Tripod, le célèbre raton-laveur à trois pattes. Adjoint du shérif, c’est lui qui est appelé lorsqu’une jeune femme utilisant des billets marqués à l’encre rouge est repérée dans un casino de la région. Lorsqu’il demande à celle-ci ses papiers, il découvre qu’elle est la fille d’un ami, ancien compagnon du Vietnam, mort il y a plusieurs années, lors d’un braquage. Robicheaux, témoin de la scène, était alors trop saoul pour intervenir et la mort de Dallas Klein est restée comme une épine dans sa conscience. Plus tard, c’est aussi Robicheaux qui va constater le décès d’une jeune fille, dont le corps a été trouvé par son père, Césaire Darbonne. Que s’est-il donc passé pour que cette jeune étudiante, sage et studieuse, finisse par se tirer une balle en plein front?

Dave commence à enquêter et découvre très vite qu’à la jonction de ces deux affaires, se trouve un seul et même homme : Bellerophon Lujan, celui qu’il soupçonne d’avoir fait assassiner son ami Dallas… Marchant à la fois sur les traces de son passé et sur la piste de destins que le hasard a fait se croiser, Robicheaux doit aussi composer avec le FBI et les puissants de la région. Au fur et à mesure que le mystère s’épaissit et que les cadavres s’amoncellent, il se persuade que toutes ces affaires sont liées par un fil invisible qu’il doit absolument trouver.

Dans ce nouvel opus, James Lee Burke nous offre une écriture souple et dense, au service d’une histoire taillée sur mesure dans la Louisiane d’aujourd’hui, cet Etat qui n’est rien d’autre, dit l’auteur, que la poubelle des Etats-Unis. Pollution, corruption, drogue, chômage et incidents climatiques : le malheur y semble, en effet, concentré sous toutes ses formes. A travers ce roman, l’auteur nous livre le portrait d’une époque et d’une société qui n’ont pas fini de broyer de l’humain pour mieux servir le dieu « Money ».

Conseillé par
21 mai 2010

Pour Charles – 73 ans – et Georges – 83 ans -, ce projet de Tour de France en voiture a le goût de la dernière chance. Malheureusement, au dernier moment, Adèle, la petite fille chargée de veiller sur son grand-père, pendant que sa mère est en voyage, découvre le pot-aux-roses… car le projet a été élaboré dans le plus grand secret. Les deux grands-pères vont-ils devoir renoncer à ce voyage qui leur tient tant à cœur? Non, Adèle promet de rester muette si son grand-père lui envoie tous les soirs un SMS pour la rassurer sur son état et l’informer de sa situation géographique. Voilà donc nos deux papis partis dans la Renault Scénic, flambant neuve et sur-équipée, achetée pour l’occasion.

Ce voyage sera pour Georges et Adèle, l’occasion de renouer un lien qui s’était distendu à cause du temps et de la distance. Mais il permettra également de multiplier aventures et rencontres, haltes gastronomiques et siestes gargantuesques. On sent que Caroline Vermalle a jubilé en imaginant les aventures de ses deux héros à la retraite. Non contente de nous livrer des dialogues pleins de malice et de gouaille, elle s’amuse avec leurs sentiments, les amenant tranquillement à découvrir – peut-être un peu tard mais peu importe – les plaisirs de la vie. Car Georges, vieux ronchon, qui n’aspirait autrefois qu’au calme et à la solitude, se rend compte qu’il s’est trompé. Il aime faire des rencontres, il aime parler, même si c’est pour ne rien dire et il aime voyager! Et, peut-être le plus incroyable, il aime envoyer des textos à sa petite-fille!

L’avant-dernière chance est un roman sympathique. Un roman qui se lit facilement, un pur plaisir du dimanche matin, quand on traîne sous la couette avec une tasse de thé. Sous des dehors légers et fantaisistes, il aborde néanmoins des questions vitales. Gorgé d’un amour qui a du mal à s’avouer, d’une tendresse qui peine à s’exprimer, il parle à chacun d’entre nous, qu’on soit petit-enfant, enfant ou grand-parent et célèbre – pas moins! – la vie, qui vaut d’être vécue jusqu’au bout! Un livre à offrir, à partager, sans risque de se tromper…

Éditions Gallmeister

24,30
Conseillé par
20 mai 2010

Le shérif Walt Longmire, de Durant, dans le comté (fictif) d’Absaroka, n’est pas débordé par le travail. Quelques ivrognes, des querelles de territoire, des touristes perdus dans la montagne… Il a, pour l’aider, trois adjoints, dont Vic, ex-flic spécialisée en balistique à Philadelphie. Entre sa maison où rien n’a vraiment bougé depuis la mort de sa femme et le Red Pony, le bar tenu par son ami Henry Standing Bear, le shérif traîne sa grande carcasse en attendant que le temps passe.

Or, voilà qu’il reçoit un appel. On a trouvé un corps, dans les pâturages. Blessure mortelle par balle. Quand le shérif découvre l’identité du mort, il devine qu’il ne s’agit pas d’un accident de chasse. Cody Pritchard était, en effet, un des quatre garçons qui ont violé Little Bird, une jeune fille cheyenne qui vit sur la réserve toute proche. Rapidement, Longmire comprend que les trois autres violeurs sont aussi menacés. Aidés de ses adjoints et de ses amis, il se lance sur la piste du tueur, ce qui ne l’empêche pas, dans le même temps de tenter de nouer une relation avec Vonnie, une femme troublante et riche, au passé incertain…

Craig Johnson, le « père » de Longmire, prend son temps pour raconter cette première histoire avec le shérif en personnage principal. Si la nature est présente, elle ne tient pas le devant de la scène, comme dans les romans de Tapply. Ici, ce sont surtout les personnages qui sont importants. Avec leur passé, leurs idéaux, leur désirs refoulés. Chacun a son importance. Depuis Vic, tête de mule qui jure comme un charretier jusqu’à Oscar, milliardaire mal luné aux pouvoirs illimités… Tous permettent à l’auteur de jouer de sa palette de couleurs et de sentiments. Entre Blancs et Indiens, tout ne va pas forcément bien. Mais il y a aussi des amitiés indéfectibles, comme entre Walt et Henry… L’humour qui saupoudre l’histoire fait mouche et on se surprend à pouffer à certaines répliques, vraiment bien envoyées! C’est une vraie plongée dans un autre monde qu’on fait en lisant Little Bird, avec un dénouement plus qu’inattendu…

roman

Philippe Rey

Conseillé par
17 mai 2010

Adele et Henry. Un couple étrange, pas au sens classique du terme puisqu’il s’agit de la mère et du fils. Ils vivent à l’écart, dans un petit lotissement, évitant au maximum les échanges, les rencontres. Henry, jeune teenager (il a tout juste treize ans mais possède une maturité bien supérieure à son âge réel) sait bien que sa mère est bizarre. Qu’elle ne ressemble pas aux autres mères, qu’il croise parfois. Sans réel travail, affolée à l’idée de sortir de sa maison, sans amour et sans ami, elle a de curieuses sautes d’humeur, des réactions imprévisibles qui mettent Henry mal à l’aise. Cependant, puisque son père est parti reconstruire une famille à quelques rues de là, le jeune garçon se sent investi du devoir de prendre soin de celle qui l’a mis au monde.

Or, un jour, alors qu’Adele s’est risquée à emmener son fils faire quelques courses au supermarché, voilà qu’un inconnu les aborde. Il est blessé mais pas vraiment inquiétant. Il demande de l’aide, qu’on lui prête asile pour quelque temps. Adele accepte et ramène Frank – c’est le nom de l’homme – chez elle. Très vite, elle et son fils comprennent que Franck s’est évadé de prison. Mais curieusement, l’inconnu n’a pas une attitude très inquiétante. Au contraire, énergique, doux, respectueux, il apporte avec lui un vent de nouveauté qui renouvelle l’air un peu saturé dans lequel Henry et sa mère évoluaient jusqu’alors. Finies les boites de soupes Campbell, Frank fait la cuisine comme un chef. Fini l’ennui dans la chaleur des après-midis, Frank sait comment distraire un jeune garçon. Fini le silence, la radio chante et dans le salon, Adele et Frank dansent…
Si Henry est soulagé d’avoir enfin de l’aide pour prendre soin de sa mère, il est aussi inquiet à l’idée que cet homme puisse faire voler en éclats leur vie à l’abri du monde car entre lui et Adele, l’amour est presqu’immédiat. Love at first sight… A treize ans, on ne connait rien à la vie, même si cette vie s’est chargée de vous faire mûrir trop vite. En plein doute, ne sachant pas s’il peut faire confiance à cet étranger, Henry est tenté de s’en débarrasser, y compris par des moyens peu appropriés.

Roman d’apprentissage, histoire d’amour, radiographie des conséquences d’un acte fondateur, manuel sur la puberté, ce livre peut se lire de bien des manières. Le style de Joyce Maynard, sans tambour ni trompette, sans artifice non plus, emmène doucement le lecteur sur le chemin de ce récit dont l’éclat se révèle au fil des pages, jusqu’au dernier mot. Les personnages prennent tout de suite toute leur consistance et sont particulièrement attachants. A coups de plume légers, l’auteur décrit parfaitement les peurs, les doutes et les espoirs des uns et des autres. Un livre à offrir à ceux qu’on aime ou bien à s’offrir pour une pause délicate et pleine de charme.

roman

Buchet-Chastel

Conseillé par
17 mai 2010

Dans une campagne immuable, Annette, femme encore jeune, et son fils, Eric, essaient de prendre racine. A la suite d’une annonce à laquelle elle a répondu, Annette, en effet, a fait connaissance de Paul, paysan installé dans un hameau du Cantal, pris dans l’écheveau des terres, des bêtes et d’une famille qu’il n’a pas choisi mais avec laquelle il a appris à composer : Nicole, sa sœur, et ses deux oncles octogénaires. Mais Paul, même s’il sait que personne ne reprendra l’exploitation après lui, refuse de se passer de la douceur d’une femme pour vivre à ses côtés, l’accompagner, partager avec lui les longues nuits d’été, les repas de famille, les joies et les soucis. Quelques rencontres avec Annette ont suffi pour qu’ils comprennent qu’entre eux une forme de compagnonnage était possible. Et promptement, elle a déménagé de son Nord natal pour venir s’installer à la ferme.
L’annonce est le récit de cette arrivée, ou plutôt de cette greffe, dont on se demande à chaque page si elle va prendre, tant pour la mère que pour l’enfant qui doivent faire face à une hostilité plus ou moins larvée, à des usages inconnus, à des rites implicites. La description des paysages, des habitudes et des personnages fait sentir au lecteur cette terre aride, difficile à apprivoiser, qui recèle dans ses plis des beautés simples mais aussi une certaine sauvagerie, tapie au creux des bois et des champs, prête à bondir. Il y a de très beaux passages – l’orage, la nuit, les jeux d’Eric avec Lola, la chienne de la ferme – écrits dans un style précis, riche, affûté, parfois jusqu’à l’excès…

Je sais que beaucoup sont unanimes pour considérer ce roman comme une réussite. Pour ma part, je l’ai trouvé inégal. A cause du style, justement, qui enferme le récit dans un corset de mots sophistiqués à l’extrême quand il faudrait mettre, ici et là, une certaine simplicité : Le fils des Vidal de Soulages, écrasé à vingt-deux ans par son tracteur neuf renversé sur une pente cent fois pratiquée en d’usuelles circonstances… Pour le coup, je les trouve plutôt aggravantes, les circonstances… Plusieurs fois, l’envolée d’une description poétique finit par retomber lourdement en stéréotype : le paysan taiseux, la vieille dame digne à chignon, la sœur vieille fille et aigrie, le gamin qui se tait mais qui n’en pense pas moins. Enfin, j’ai été gênée dans ma lecture par un tic d’écriture qui revient une dizaine de fois au moins : les bouchées faisaient bosse le long des cous maigres (p86), une femme faisait besoin à Fridières (p43), la grange était vaisseau (p62), ils ne donnaient pas peine (p59), les toits du Jaladis faisaient repère (p67), le vain désir de faire famille (p97). Cette absence systématique d’article avant le mot, lue une fois ou deux, peut « faire patois » (!) mais après cinq ou six occurences, ça « fait style »…

Malgré ces réserves, j’ai trouvé cette histoire sobre et touchante. L’auteur y déploie le portrait clairvoyant d’une vie paysanne traversée de réflexes millénaires, où se déploie une intelligence muette entre les hommes, les bêtes et la nature et d’où les tiraillements créés par la modernité ne sont pas absents.